En son temps, Brassens chantait les éloges du déserteur.
En son temps, Brassens chantait les éloges du déserteur.

Il y a un héros dont on ne chante jamais les louanges : le déserteur.

Qui sont les déserteurs ?

Des hommes et des femmes sans médaille, sans fanfare, sans tombe fleurie au nom de la patrie.

Des êtres trop lucides pour mourir pour des symboles, trop conscients pour se jeter dans la grande boucherie des nations.

Ceux-là fuient. Ceux-là désertent.

Et il est temps de les célébrer !

Dans les cafés de Chiang Mai, sur les plages de Phuket, dans les ruelles tranquilles de Bali, vivent aujourd’hui des Russes et des Ukrainiens que l’on qualifie volontairement de traîtres ou de lâches. Ils sont jeunes, cultivés, parfois ingénieurs, parfois artistes, et tous ont fui l’appel du sang. Quand leur pays leur a crié « sacrifie-toi », ils ont tourné les talons. Ils n’ont pas couru vers les tranchées, mais vers la vie. Ils ont refusé d’être la chair à canon des ambitions de leurs dirigeants. Ils ont refusé d’être une statistique patriotique qui fera frissonner les discours officiels.

Leur courage est d’un autre ordre : celui de dire non. Non à la guerre, non à la haine de l’autre, non à cette passion morbide qu’on appelle « honneur » et qui n’est souvent que le masque grotesque de la mort donnée en spectacle. Ils ont choisi la vie plutôt que la mort. Ils n’ont pas fui leur devoir, ils ont redéfini ce qu’il devait être : vivre, aimer, penser, créer — et non pas tuer au nom d’un drapeau.

Dans un monde qui glorifie la brutalité en uniforme et méprise le bonheur, le déserteur est une figure tragique et magnifique. Il n’est pas lâche, il est libre. Il n’est pas traître, il est humain. Il n’est pas égoïste, puisqu’il refuse de prendre la vie de son frère pour préserver la sienne. Le déserteur a conscience que les frontières, les hymnes, et les serments sont des breloques d’un passé révolu. Des breloques qui ont moins de valeur qu’une plage de sable fin.

On les méprise parce qu’ils refusent le grand théâtre viril de la guerre. On les accuse de ne pas se battre. Mais ils se battent ! Ils se battent pour rester vivants. Ils se battent contre la folie du monde. Et ce combat-là est bien plus digne d’admiration que celui des fanfarons de l’héroïsme national.

Alors saluons-les !

Saluons ceux qui ont dit non aux tambours de la guerre. Ceux qui ont préféré les cocotiers aux casernes. Qui ont refusé de mourir pour un terrain vague ou une frontière absurde. Ce sont eux, les véritables artisans de la paix. Non pas les politiciens qui parlent de désescalade, mais les hommes qui, par leur attitude, grâce à un geste simple et immense, ont choisi de renoncer au champ de bataille.

Il n’y aura pas de monument pour eux. Alors que ce texte soit leur pierre blanche.

Il faut beaucoup de courage pour fuir !

Ecoutez la superbe chanson de Georges Brassens « Mourir pour des idées » sur Youtube.

Lire l’article « Éloge de la lâcheté« .

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